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June 1, 2023 21 mins

Éric et Félix ont une discussion décontractée sur leur initiation au chemsex, leur parcours de consommation et leurs expériences lorsqu'ils étaient “gelés”. Cet épisode aborde les thèmes de sensations fortes, de désirs, de plaisirs ainsi que de la masculinité et de pressions à la conformité dans la communauté gaie et autres normes sociales. 

Un balado proposé par Éric et Félix

 

Si vous souhaitez obtenir du soutien en lien avec le chemsex, consultez la liste de ressources et de services disponibles sur la page: Ressources / services chemsex.

https://qollab.ca/ressources-services-chemsex/

 

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Episode Transcript

Available transcripts are automatically generated. Complete accuracy is not guaranteed.
(00:00):
Cette série de balados aborde la consommation de drogues et la sexualité.
Si vous ou une personne de votre entourage avez besoin de soutien,
des hyperliens vers des ressources d’aide sont
disponibles dans le texte de présentation de l’épisode et sur le site chemstory.ca

(00:21):
Vous écoutez Chemstory, une série balado créée par des
personnes ayant une expérience vécue de chemsex.

Éric  (00:29):
Fait que gros max 17 h  mettons, on se dit que c’est fini.

Félix  (00:35):
Gros max ! J’ai mes  souliers mis puis je suis parti.

Éric  (00:38):
Non, mais.... [rire]

Félix  (00:38):
Je suis en bas. Tu  ne me le diras pas 2 fois !

Éric  (00:41):
Non, mais juste pour  pas qu’on fasse trop long.
Fait qu’il faudrait quand même se présenter, je pense.

Félix  (00:50):
Oui, c’est de base, ça va toujours mieux.

Éric  (00:53):
Je m’appelle Éric,
j’ai 37 ans et je suis dépendant [rire] et j’utilise les pronoms il et iel.

Félix  (01:04):
Je m’appelle Félix. Je suis,
bien… [rire] J’utilise les pronoms il et iel. J’ai 24 ans, 25 cet été.

Éric  (01:16):
Puis… bien… Les deux on fait  du chemsex. Fait qu’on s’est dit
que ça serait le fun… De faire nos podcasts ensemble, puis de
pouvoir comme ça un peu échanger sur notre expérience. En tant que aussi deux personnes

(01:37):
non binaires d’avoir une conversation juste… Entre nous, finalement. Sur ce qu’on a vécu. Puis… c’est
quoi notre parcours, un petit peu, depuis qu’on a commencé à avoir du chemsex jusqu’à maintenant.

Félix  (01:53):
Oui.

Éric  (01:53):
Tu sais, on peut le dire, nous, on  se connaît des groupes de rétablissement.

Félix  (01:56):
Oui.

Éric  (01:57):
C’est là qu’on s’est rencontrés. À  CMA. Dans les groupes de rétablissement,
c’est ce qu’on dit, on parle rarement de nos consommations, on parle plus de comment
on se rétablit. Tu sais, puis c’est à ça que servent ces groupes-là. Mais on avait envie,
je pense, de se parler, tu sais, de nos consommations dans un espace sécuritaire qui
est chez nous, [rire], mais en sachant qu’on se rétablit. Comment on commence ça ? [rire]

Félix  (02:22):
Bien, je pense qu’on pourrait se poser  des questions. Moi je suis curieux, tu as 37 ans,
ta consommation.. Tu as commencé à consommer, tu avais quel âge ?

Éric  (02:34):
J’ai commencé, pour la première  fois. Tu sais quand on dit « chemsex »
on pense à crystal meth évidemment. Puis moi, la première fois que j’ai pris du crystal meth,
c’était en novembre 2011. Moi, tu sais, je fumais pas de pot… J’étais pas… J’avais déjà, tu sais,
pris deux fois une MDMA ou une ecstasy dans ma vie tu sais. Mais vraiment, j’étais vraiment… Moi,
je buvais, c’était ça mettons, ma drogue de choix. Fait que le crystal meth, c’est comme

(02:59):
un peu arrivé, tu sais, vraiment comme une tempête, un peu, dans ma vie. C’était comme
du jour au lendemain tout à coup tu passes de boire à prendre du crystal. Moi j’ai pas
eu la gradation, tu sais, l’espèce d’histoire de gradation. Je ne sais pas, toi, c’est ...?

Félix  (03:12):
Non moi, ça a été  plus une courbe ascendante.

Éric  (03:16):
Ok.

Félix  (03:16):
Ça a commencé avec le pot genre au  secondaire, puis fin de mon secondaire-cégep.

Ben là c’était plus comme drogue dure  (03:21):
cocaïne,  etc. À l’âge de… Je pense, j’avais 22 ans,
je suis revenu de voyage avec mon ex. Mon ex m’a laissé, mais en fait il est parti lui tout
seul. Fait que ça comme mis fin à notre couple. Puis moi je suis parti sur une dérape. Tu sais,

(03:42):
je consommais déjà, tu sais, je partais toute la nuit, puis là je consommais, puis là je me
ramassais dans des… chez des gens que je trouvais sur Grindr, whatever. Puis un moment donné… c’est
ça, ça s’est fait de même qu’on m’a présenté du crystal meth. Puis tu sais, j’avais déjà fait du
GHB, tout ça. Fait que, tu sais, ça a été… J’ai pas eu tant à aller chercher non plus, tu sais…

Éric  (04:03):
Hey, moi non plus.

Félix  (04:05):
Tu comprends tu ?

Éric  (04:06):
Oui oui. C’est quoi le souvenir que tu  as de ta première consommation de crystal ?

Félix  (04:10):
Que c’était dangereux, excitant,  le fun. Puis, tu sais, je dis dangereux,
mais en même temps inoffensif. Il n’y avait pas de gros warning
signs. Ça s’est fait comme « ah je le fais tu, je le fais pas ? Je le
fais ! » Puis on me l’a proposé. C’était dans la petite pièce du sauna là genre…

Éric  (04:29):
Au sauna ? Oh mon  Dieu ! [sarcastique] [rire]

Félix  (04:33):
Outrageous de même… oui. [rire]

Éric  (04:38):
Moi aussi, moi aussi. [rire] Évidemment.

Félix  (04:41):
Ah bien. Fait que, c’est ça, ça c’est  comme tu sais, il devait être, je sais pas,
c’était tôt le matin, c’était comme tu sais, dans l’espèce de marathon d’une nuit,
de consommation. Je dis marathon parce que, tu sais, je m’en allais chez quelqu’un,
puis là après je m’en allais chez quelqu’un d’autre, puis là je finissais au sauna. Puis,
tu sais, tout ça à travers les applications souvent, ou juste des fois je me pointer au sauna,

(05:02):
parce que je trouvais pas du monde sur l’application, fait que là c’était comme…

Éric  (05:05):
Mais ça donc tu faisais déjà  ça avant de consommer du crystal ?

Félix  (05:09):
En fait, ça c’est toute fait en même  temps. Tu sais, j’avais déjà un problème de
consommation à la base, tu sais. Je me rétablissait. J’essayais déjà de
Get Sober depuis comme trois-quatre ans dans les fraternités, puis tout ça… Peut être trois ans,
puis j’accrochais juste pas je je faisais un, trois-quatre mois de sobriété. Je rechutais,
etc... tout ça de, tu sais, partir sur des vrilles. Tu sais, moi exemple,

(05:31):
je pouvais veiller avec du monde, le monde, tu sais on buvait, on faisait de la coke
ou tu sais de la MD ou whatever, puis, tu sais, le monde à moment donné ils vont se
coucher ou ils vont chez eux, tu sais. Mais moi j’étais comme non non, j’ai envie de fourrer.

Éric  (05:43):
Bien oui.

Félix  (05:43):
Tu sais, j’ai envie de baiser, je suis  on. Tu sais, d’aller sur Grinder puis là de
trouver. Tu sais, j’étais genre à Saint-Henri et là de trouver un gars au centre ville. Puis là,
de me rendre là en taxi. Puis là, le gars, ça finit tout croche parce que les deux on est pétés…
Puis tu sais, c’est bizarre, puis là, il me sacre dehors de chez eux, puis là. Ok d’abord, mais moi

(06:05):
j’ai pas encore… Je suis pas encore venu tu sais… Fait que m’a aller au sauna tu sais,
il me reste de l’énergie, tu sais. Fait que au sauna, puis là, beh… Cette fois-là, c’est ça…

Éric  (06:19):
Le crystal est arrivé… Félix 
Hum… Tu sais moi, ma première fois,  c’était au sauna aussi. C’est ça. Je rencontrais
un gars qui là à un moment donné demandé me fait rentrer dans une chambre. Puis là,
dans cette chambre-là, il y avait un gars que je trouvais vraiment beau qui fumait du crystal.
J’associais le fait de fumer du cristal avec coucher avec ce gars-là. Puis c’est ça, j’ai fumé.

(06:40):
Puis finalement, tu sais, j’ai passé comme 48 h avec ce gars-là. Tu sais, au sauna après ça, chez
lui… [pause] C’est ça qui est dur… Même encore aujourd’hui, j’en parle, tu sais, puis j’ai de la
misère à en parler, parce que je sais tout ce que ça m’a amené. Mais cette première fois-là, puis
c’est de ça qu’on parle jamais, mais… c’était vraiment extraordinaire ! [rire] Ce que tu ressens

(07:07):
dans ton corps. Je veux dire, cette drogue-là a fait, a nous fait quelque chose. Fait que le high
tu sais, il est incroyable. Puis évidemment, j’imagine que le premier, il y a comme cette
affaire-là, le mythe de la première fois, puis qui pour moi est vrai. J’avais réussi à me pogner le
gars que je voulais pogner. Je me sentais donc hot sexuellement. C’était évidemment là. J’avais

(07:27):
fait le cocktail de toutes les… GHB crystal, Viagra, la sainte Trinité, [rire].
la trinité [simultanément] !
Puis c’est ça, je me souviens, je suis rentré chez moi. Je me souviens de prendre une douche, puis

dans la douche là, me dire  (07:39):
« Oh shit ! J’ai bien  trop aimé ça ! » Je sentais que j’étais comme,
« je pense que je vais avoir un problème. » Puis en même temps, cette première fois-là, j’étais
comme, j’étais juste dans l’euphorie d’avoir fait ça. Je me trouvais tellement wild, tu sais.
C’était tellement pas moi de faire une affaire comme ça. Tu sais, moi j’étais vraiment… Tu sais

(07:59):
j’étais le bon élève. Je faisais pas des drogues comme ça, tu sais, je faisais pas de drogue ou
presque, tu sais, je faisais des… Là je venais de comme… aller vers quelque chose… j’avais désobéi
comme à des règles non écrites par personne, mais j’avais ce sentiment-là que j’étais devenu tout à
coup trash, puis wild ! Puis j’aimais ça. Il y avait comme quelque chose que je trouvais
bien attirant là-dedans, tu sais… C’est ça. Puis moi, ce qui s’est passé, c’est que j’en

(08:23):
ai refait une autre fois, après, quelques jours après, parce que je partais après ça au Mexique

pour trois mois. Fait que je me disais  (08:28):
« ah  c’est correct, je vais en refaire »… Puis là,
à ce moment-là, je n’avais pas peur de rien parce que je me disais : « Ah ! C’est correct,
là, je fais ça une fois ou je le refais, puis je m’en vais en voyage, puis… » Mais j’ai passé
trois mois à y penser. Tu sais, c’est cette espèce de négociation mentale là, dans ma tête,
était déjà là. Puis je suis revenu de voyage trois mois plus tard. Puis là,

je m’étais dit  (08:46):
« non, non, il ne faut pas  que je retombe là-dedans, ça n’a pas de sens,
c’est dangereux. » Ça a duré deux semaines, puis là, ça a été mes grosses années de consommation.

Félix  (08:55):
C’était quoi ta fréquence ?

Éric  (08:57):
Ben ça a été un week-end sur deux  où tous les week, même des fois chaque
week-end. Mais j’ai continué à travailler. Je n’ai pas perdu ma job à ce moment-là.
Fait qu’il fallait quand même que je me ramène à chaque semaine puis que je dégèle.

Félix  (09:08):
hum hum… Moi c’était… C’était soit tous  les week-ends pendant un bout. Puis, tu sais,
moi ça a été très, très, très rapide, ça a été tous les week-ends. Mais tu sais,
moi j’avais déjà, j’étais déjà magané de quelques années de consommation à jouer.
Tu sais où je, bien à consommer à chaque jour, puis à jouer avec des downer avec des uppers. Puis

(09:29):
tu sais, je pense que j’avais déjà un bagage chimique dans le cerveau qui faisait que à fin,
moi ça m’a. Tu sais, je me mettais à… Tu sais, j’ai fait une psychose et ça m’a vraiment fait
capoter, tu sais ça. Puis parce qu’à la fin, moi je pense que c’est mon cerveau,
il a disjoncté et il n’était juste plus down que.. Tu sais je pense que c’est très fort

(09:52):
quand même là, de jouer avec du crystal meth, du GH. Puis… Tu sais, c’est ça !

Éric  (10:00):
À un moment donné, je m’étais rendue à  quatre nuits blanches. Ça, c’est cinq jours,
tu sais, quatre nuits sans dormir. Quand je repense à ça, c’est vraiment dangereux. Puis là…
J’avais essayé de dormir, mettons, la dernière nuit parce que je travaillais et j’avais pas,

(10:21):
j’avais pas été capable. Puis là, je me préparais à aller travailler,
puis j’entendais des voix. J’avais une voix derrière moi, dans ma tête qui me parlait. Puis,
j’ai appelé mon boss, puis là c’est la première fois. C’est la seule fois où j’ai fait : « Je peux
pas ! » Il fallait que je donne une formation cette journée-là, Genre un groupe de genre,
dix personnes. [rire] Tu sais, Oublie ça ! Alors que tu entends des voix… essaye de… Quelle voix va

(10:49):
donner l’information ? [rire] Ouais, puis. Puis… Là, j’ai eu peur… Vraiment vraiment vraiment peur…
Parce que là je me suis dit là, je tenterais de perdre mon cerveau. Tu sais, je suis en
train de. Bousiller ma tête à jamais… Puis, à moment donné, je me disais : « non, calme-toi,

(11:09):
tu vas dormir, ça va se replacer ». Puis j’ai dormi cette nuit-là. Je me suis réveillée le
lendemain. Puis j’avais encore des voix dans ma tête… Et puis là, après, comme trois-quatre-cinq
jours, là c’est revenu, comme je n’avais plus ça. Mais pourtant, tu sais, après cet épisode-là,
j’ai reconsommé. Tu sais, j’ai eu un épisode à un moment donné dans une chambre de sauna
où je me suis… J’ai passé out tout seul dans une chambre de sauna. Je me suis

(11:32):
réveillée 4 h plus tard. J’aurais pu tu sais… Tu dors sur le dos, tu avales ta langue, tu
t’étouffes. C’est fini là. T’es mort seul dans une chambre de sauna, tu sais… c’est quand même…

Félix  (11:42):
Ouin. Mais une chance,  t’étais tout seul quand même,
tu comprends. Parce que on en entend des histoires de viol, des affaires de même…

Éric  (11:48):
Oui, mais en même temps oui, mais en  même temps, tu vois, c’est drôle parce que moi,
cette fois-là, j’étais allée avec quelqu’un au sauna qui avait pris une autre chambre.
Mais tu sais, j’étais avec quelqu’un qui est un ami de consommation, mettons que j’avais vu
plusieurs fois. Puis tu sais, il savait que je feelais pas parce qu’à un moment donné je
feelais pas, il m’avait entendu vomir. Il était venu cogner à ce moment-là et puis

(12:08):
je répondais pas… Puis il n’a jamais de checké. Puis il est parti, tu sais.

Félix  (12:12):
Parce qu’il était pété lui avec !

Éric  (12:13):
Mais c’est ça. Puis moi cette  journée. Mais moi je me souviens m’être

dit  (12:15):
« c’est pas des amis ! » Parce  que… pas parce qu’ils sont pas fins,
c’est pas du jugement sur les personnes qui consomment… dans l’état où on est. C’est pas
vrai qu’on peut être là vraiment pour les autres, tu sais. Puis je dis ça parce que on va chercher
un esprit de communauté dans la consommation de drogues… Je trouvais vraiment là-dedans, tu sais,

(12:39):
un bound avec les gens là, tu sais… Je ne sais pas toi. As tu cette expérience-là ? C’était tu ça…

Félix  (12:44):
Quelques expériences, quelques expériences  que je sentais, une connexion avec certaines
personnes, mais certaines expériences que tu racontes aussi, que j’avais vraiment… des fois
même du rejet, que j’ai expérimenté le rejet, chez un dude ou whatever ! Tu sais sentir que
je suis pas adéquat ou… Tu sais, alors que des fois c’était complètement à l’opposé,

(13:06):
que je me sentais comme super power tu sais… Mais j’avais pas tant des amis de consommation. Moi

c’était vraiment égoïste, c’était vraiment :  pour moi ! Puis de sentir qu’il y a personne (13:14):
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qui est là pour moi là-dedans. Tu sais quand le gars à côté il commence à déparler ou tu sais,
il fait… ses yeux ferment parce que il est en débuzz GH ou je sais pas quoi, tu sais il en a

(13:35):
trop pris puis juste à côté. Puis là il se met à dire n’importe quoi, puis tout bien… Puis que moi

je le juge dans sa tête, puis je suis comme :  « Bien voyons. Qu’est-ce que tu fais là ? » (13:40):
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Éric  (13:43):
Oui parce qu’on veut que  les autres soient là pour nous,
mais nous non plus on pas est là peur eux… On est pas vraiment là…

Félix  (13:46):
On est pas là pour eux… [simultanément]

Éric  (13:48):
Oui, mais je pense que quand je dis… Moi,  le sauna était, je ne sais pas toi, mais moi,
le sauna était vraiment important dans ma conso là… C’était vraiment mon endroit de choix pour
aller consommer pour moi parce que… Ce n’est pas une esprit de communauté, mais moi ce que
j’aimais, c’était on se créait un monde à part, à côté de tout le reste. Le temps n’existe pas,

(14:10):
il n’y a pas de fenêtre. On peut rester là aussi longtemps qu’on veut. Personne ne nous
voit. Tu sais, j’aimais ça ce côté là… Puis moi mes premières expériences sexuelles,
c’était du sexe en ligne, tu sais des chats de rencontre. Il n’y avait pas de Grindr à l’époque,
c’était des Easy Gay Chat et gay411 un et le chat de Priape tout ça,

(14:31):
bref. Les personnes au-dessus de 35 ans qui nous écoutent vont comprendre de quoi je parle. Puis
personne ne peut le voir. Mais là, Félix il fait une face de gen z qui me juge ! [rire]

Félix  (14:48):
Vraiment pas… [rire]

Éric  (14:48):
Moi j’avais appris que pour être  dans cette communauté là… Fallait être d’une
façon physiquement, fallait être un bon amant, fallait coucher avec beaucoup de monde,
fallait, tu sais. Il y avait comme plein de coches, qui fallait rencontrer pour
être dans cette communauté-là ou être accepté dans la communauté gai mainstream montréalaise.

(15:09):
Puis que le rejet vient rapidement quand tu n’es pas dans ses cases là. Si tu es un peu
gros, tu es trop maigre, si tu es trop efféminé, si… tu sais. Puis moi j’étais vraiment bon pour
plaire.. J’avais le même corps que j’avais puis, mais j’essayais quand même de tout faire
pour pallier à mes « défauts ». Tu sais, pas être trop féminin et m’habiller d’une certaine
façon et j’essayais vraiment de fitter. Puis le crystal m’a comme permis. C’était tellement de

(15:32):
pression tout ça… Fait que le crystal enlevait tout ça. Puis je me croyais dans ce rôle là
pour la première fois ! Tout à coup, j’avais l’impression de pouvoir être cette personne là,
tu sais, qu’il fallait que je sois. Même si tu sais ? Pourtant il y a rien qui changeait, mais
je pognais. Ça marchait. Fait que, j’avais comme. Mais évidemment, tu sais, c’était avec d’autres
addicts. C’est sûr qu’entre nous… C’est là que je dis qu’il y a une communauté, tu sais, on se

(15:54):
reconnaît, puis on se retrouve, puis on finit par baiser ensemble, puis on finit par… À l’intérieur
de ce petit monde-là… On est finalement un peu accepté complètement. Et puis… Après tu sais,
ça c’est tu pars de Superman, puis tu deviens. Je sais pas comment nommer ce que tu deviens, mais tu
sais, le down c’est ça là… Moi je… Après les binge de conso. Là, j’étais un moins que rien. Et puis

(16:21):
c’est ça, cette communauté-là est finie, tu sais, après quand je recroise dans la rue, si je croise
des gens avec qui j’ai consommé, je veux surtout pas les voir, surtout pas leur parler, tu sais…

Félix  (16:26):
On ne se dit pas allo.

Éric  (16:28):
Puis, on se dit pas  allo. Parce qu’on a honte…

Félix  (16:29):
Bien tu l’as dit tantôt, tu sais,  c’est comme un monde parallèle. Oui, il y a le
sentiment de de communauté, de… Moi aussi, quand je suis arrivé à Montréal à 16-17 ans, à 17 ans,
moi en fait, j’étais en couple avec un gars qui baignait pas trop dans la communauté gay, puis

(16:50):
tout fait que moi j’avais comme un peu cette espèce de distance là. Tu sais, moi j’allais
comme au Cégep du Vieux, puis j’étais comme bien artsy, bien nanana, et j’étais comme… Mais je me
tenais avec du monde du village, fait que j’étais comme un peu la petite artsy fuckée
rousse qui vient une fois de temps en temps quand elle n’est pas avec son chum genre là…
Puis fait que tu sais, je baignais pas trop là dedans, puis je fittais, mais weird tu sais.

Éric  (17:15):
Humhum, huhum.

Félix  (17:15):
Fait que moi j’avais comme cette espèce de  jugement-ish par rapport au village, tu sais. Mais
j’aime ça. Mais tu sais en tout cas. Faque là, on dirait de faire partie du truc, d’aller là,
puis comme tu le dis tantôt, de fitter dans une case. Tu sais,
moi j’ai toujours eu des problèmes d’image corporelle, tu sais, par rapport à mon corps,

(17:36):
tout ça et là Heille ! Ça l’impression d’être… Une jeune mince, tu sais, désirable,
désirée, aimée quasiment. C’était ça que j’allais trouver, tu sais,

Éric  (17:51):
C’est tellement ça. [simultanément]

Félix  (17:51):
C’est ça que j’allais chercher  toute ma vie d’être aimée. Tu sais, la
certitude qu’on m’aime, tu comprends ? De pas tout le temps de double check tu sais…

Éric  (18:00):
Parce qu’on dit tu sais qu’on était aimé.  Et puis moi ce que j’aimais, c’était que tout à
coup je pouvais me transformer aussi en cette personne où je me sentais assez beau et assez
puissant pour être capable de… C’est terrible ce que je vais dire, mais : choisir, puis rejeter du
monde. Et puis il y avait, tout à coup le pouvoir est inversé. Puis après ça, tu te fais rejeter

(18:21):
aussi, finalement. Ça arrive vraiment. Mais on est. On peut tu sortir à moment donné de cette
dynamique de être rejeté ou rejeter. C’est à dire qu’on peut tu être ni l’un ni l’autre ? Tu sais,
comment on fait comme communauté pour se traiter différemment ? Pis parler de la consommation,
c’est important je pense, parce que c’est… il faut comprendre pourquoi on va,
Pourquoi le chemsex est devenu si important dans la communauté gaie. On peut bien, tu sais juste

faire part au monde et dire  (18:46):
« allez-y pas !  allez-y pas ! C’est mal, ça va vous faire… » mais…

Félix  (18:49):
Mais ça répond à un besoin…

Éric  (18:50):
Ça répond à un besoin !

Félix  (18:51):
Oui.

Éric  (18:53):
Le chemsex a commencé à monter en  flèche. Bon oui, tu sais, le Crystal est
arrivé, puis tout ça, mais en même temps que les applications de rencontres, en même temps,
du fait qu’on a… [pause] Puis là encore, je vais sonner comme un vieux gai. Mais tu sais, on a
perdu, peut êtr eun sens…, peut être, je ne sais pas… un sens de la communauté. Je ne pense pas
qu’on a perdu le sens de la communauté. Je pense qu’on a perdu les moyens de se
retrouver en tout cas. Puis tu sais, c’est post-épidémie de sida aussi, de VIH/SIDA,

(19:16):
tu sais. Il y a comme tout ce… Je pense que les gais ont eu aussi envie à un moment donné de tu
sais genre… on a envie de mettre ces traumas-là derrière et de les écraser avec de la conso.

Félix  (19:27):
Quand on arrive dans la chambre à coucher  whatever, on arrive tout avec nos traumas. Puis là
ça, ça fait, c’est juste pas là, il y a pas de honte. Puis là on est juste invincibles.
Puis on peut juste se sauter dessus et juste… Parce que c’est du sexe aussi, là je veux dire,
c’est le fun. Fait qu’on a du sexe, c’est le fun, puis on fait juste profiter.

Éric  (19:48):
Puis tu sais, quand tu demandes à des gens,
c’est quand la dernière… à des gais, c’est quand la dernière fois que t’as baiser à jeun,
que tu as baisé sans boire, sans fumer un joint, sans prendre de poppers. [rire]

Félix  (20:03):
Parce que c’est une consommation aussi.

Éric  (20:04):
C’est ça là. Faque comment on fait pour  avoir cette intimité-là et cette sexualité-là…
à jeun… Tu sais ? Parce que beaucoup de gens l’ont pas. Pis après ça, le sexe que tu as sous chemsex,
il t’apparaît comme étant incroyable. Tu es cette pornstar dans ta tête. Mais après ça, si

(20:25):
tu vois une footage de ce que tu as fait, t’aimes pas ça parce que tu as l’air fucking weird.

Félix  (20:30):
[rire]

Éric  (20:30):
Mais dans le moment, tu es convaincu que  tu es genre [bruit claquement de bouche] Puis
c’est pas vrai ! Parce que même si tout ça, à ce moment-là, est beau,
ta vie marche pas… Puis moi c’est ça qui a été terrible pendant ces années là, c’est
que même pendant, même quand je consommais pas pendant des fois, même des mois. J’étais obsédé
par la prochaine consommation et je n’arrivais pas à me projeter dans des projets autres. Tu sais,

(20:54):
c’était comme tout le temps. Quand est ce que je vais pouvoir conso ...? Puis,
c’était tellement. Ça prenait tellement de place dans ma tête.

Félix  (21:00):
Oui, parce que c’est là  que tu te sentais le plus vivant ?

Éric  (21:02):
Oui, c’est ça. Tu sais.  C’est. C’est comme si c’était.
Ouais. C’est vraiment. C’est ça. Tu l’as dit. C’est là qu’on se sent le plus vivant, tu sais…
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