Jusqu'où peut-on pousser l'exigence de probité dans la sécurité privée ? Faut-il écarter un candidat non pas pour ce qu'il a fait, mais pour ce qu'il a tenté d'obtenir ? Dans un secteur où la moralité est scrutée à la loupe, une simple sollicitation d'attestation fictive peut suffire à mettre un terme à une reconversion professionnelle, même en l'absence de fraude avérée.
Aucune sanction pénale, aucun casier judiciaire, mais une suspicion jugée incompatible avec les responsabilités d'un agent de sécurité. À travers cet exemple, c'est toute la question de la frontière entre contrôle strict et excès de zèle qui se pose. Un impératif de confiance ou une rigidité excessive ? L'affaire mérite qu'on s'y attarde.
Dans la sécurité privée, la probité n'est pas une option, mais une obligation stricte. Pourtant, jusqu'où peut-on aller dans l'évaluation d'un comportement passé ? C'est la question que soulève le cas d'un ancien policier municipal, recalé par le CNAPS (Conseil national des activités privées de sécurité) pour obtenir une carte professionnelle.
Une décision confirmée par le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne le 24 décembre 2024, qui interroge sur la proportionnalité des sanctions et leurs répercussions.
Une carrière brisée par deux fautes
L'histoire de cet ancien policier est marquée par deux erreurs de parcours qui ont bouleversé sa trajectoire professionnelle. Alors qu'il était en poste à Villejuif, il a été accusé de solliciter des attestations de formation fictives dans le but de travailler en sécurité à l'étranger. Une tentative qui n'a jamais abouti, mais qui a suffi à semer le doute sur son intégrité.
À cela s'ajoute un accès illégal aux fichiers de police, dont certains contenus auraient été partagés à des tiers. Bien que ces faits n'aient pas donné lieu à des poursuites judiciaires, ils ont entraîné des sanctions administratives lourdes : retrait de son agrément par le préfet et radiation des cadres par sa commune. Une fin brutale pour une carrière dans la fonction publique.
Une reconversion stoppée net
Tentant de rebondir après ces épreuves, cet ancien policier s'est lancé dans une reconversion dans la sécurité privée, en obtenant un diplôme SSIAP en 2021. Mais sa demande de carte professionnelle, indispensable pour exercer, a été rejetée par le CNAPS. L'organisme a estimé que son passé, bien que non sanctionné pénalement, reflétait un manque de probité incompatible avec les responsabilités d'un agent de sécurité.
Le tribunal administratif, saisi par l'intéressé, a confirmé cette décision, en s'appuyant sur l'article L612-20 du Code de la sécurité intérieure. Ce texte permet de refuser une carte professionnelle dès lors que des faits, même non condamnés par la justice, mettent en doute l'honneur ou l'intégrité du candidat.
Faut-il être parfait pour protéger les autres ?
Ce cas soulève une question fondamentale : peut-on définitivement priver une personne d'un métier sur la base de comportements passés, isolés et non sanctionnés pénalement ? La sollicitation d'attestations fictives, bien qu'irresponsable, n'a pas eu de conséquences concrètes. L'accès illégal aux fichiers, quant à lui, n'a pas été jugé suffisant pour un procès. Pourtant, ces deux faits combinés ont suffi à barrer la route de la reconversion à cet homme.
Certes, la sécurité privée est un secteur où l'intégrité des agents doit être irréprochable. Mais la rigueur nécessaire pour garantir la confiance du public ne devrait-elle pas être pondérée par une forme de proportionnalité ? D'autant que cet ancien policier disposait d'un casier judiciaire vierge et d'un nouveau diplôme pour tourner la page.
Une leçon pour tout un secteur
Cette affaire illustre la ligne dure adoptée par le CNAPS pour préserver la réputation de la sécurité privée. Si cette rigueur est essentielle pour maintenir des s...